C’est lorsque le murmure gronde que je m’aime davantage, souriant au vent, appréhendant la foule pour la pourfendre, toujours seule, arpentant mon domaine, consultant mes courbes, débranchant les sondages. Paranoïaque du premier complot, narcissique à me tuer d’amour, cynique à décontenancer un chien, vulgaire à décoiffer mes lettres, désespérée à en être joviale, l’image que je veux donner revient en courant dans mes bras. Mon éclat de rire gargantuesque secouera sans un bruit une échine déjà sale, la graisse étouffera mes recoins maléfiques, je suis plantée et je suis grande, et je supporte et je rugis. Marche sur moi armée immonde, j’ai plus de force de frappe que mille, canalise toi langage, ou pas, j’ai plus de mots que nécessaire. Je ne guérirai pas pour l’heure car c’est à vif que je comprends, j’ai décidé de vivre un peu et de mourir une fois, j’ai décidé et tu suivras.
Il ne suffit pas à ma peine que la fureur s’estompe, je remuerai sans cesse, je serai toujours là, j’imposerai mon remugle. Tu ne dormiras pas. Encourageante mais exigeante, je serai fière de moi. J’ourle, j’encaisse, je contrecarre, demande moi n’importe quoi que je refuse, si tout est grave quand j’ouvre les yeux c’est parce que j’y vois. Ce que je vois déferle, siphonne, vrombit, implose, éclate, incendie, étrangle, extermine, catapulte, déchire, piétine, engouffre, dévore, se précipite en moi. On veut m’abattre, me déliter, m’aliéner, m’enduire, me soumettre, les scélérats parcourent mon corps, violent ma voix, on détruit ma raison, on veut tordre mes membres, on déverse la douleur sur les murs vides qui flambent, on lapide mes vitres de rochers en fusion, la lave entre en contact et mes veines durcissent, on veut jeter ma langue aux machines affamées, j’enrage et je bondis, je grésille, je fume, déjà je disparais mais mon tapage perdure.
J’y vois. Au temps pour moi.