Liam et Pad, deux frères irlandais au sang Atlantique, isolés sur Horse Island, escaladent inlassablement leurs falaises  afin de préparer un périple ultime dans la région du Kham, au Tibet, pourtant interdite aux étrangers. Parvenus sur place, aidés par les nomades khampas, ils cherchent à atteindre le Phur-Ri et son sommet encore inexploré, réputé éphémère, hanté et qu’on dit le plus haut du monde.

Mais un seul frère redescend.

Seul au milieu des souvenirs accumulés dans leur maison de l’île frappée par les éléments, Pad reconstitue par bribes (des strophes non versifiées, phrases hachées comme en apesanteur, au flot comme continu) cette ascension en négatif, pour élucider une étrange emprise familiale et ses absences en creux, l’amour sans langage commun, le voyage subi et les rêves poursuivis qui ne sont pourtant pas nôtres alors que l’entente du duo convoqué n’a pas tourné comme espéré.

Le style de cet objet littéraire autrichien épouse le sujet, flottant, froid et dense comme une glace à la dérive, parfois difficile à suivre mais invitant au défi, précis jusqu’à la raréfaction de l’air, pas nécessairement poétique (l’écrivain prend d’entrée de jeu ses distances avec le poème). Lorsqu’on l’a gravi et que la dernière page se tourne, le vertige demeure, et laisse interdit. Qu’avons-nous lu exactement ? Incertitude.

Pourtant les deux frères ont gravé leurs passages dans le galet de la rivière, qui poursuivra sa course erratique sans aide en formulant sa prière : c’est peu de dire qu’il lancine.

Il ne s’agit peut-être pas de la plus remarquable lecture de ces derniers mois, mais le plaisir intense de retrouver, assourdissants, les échos qu’avaient envoyés Xinran depuis Funérailles célestes, ainsi que le souffle de cette forme libre et ses cadres géologiques suffisent à me le rendre très attachant.

Christoph Ransmayr, La Montagne volante [2006], traduit de l’allemand [Autriche] par Bernard Kreiss, Albin Michel, 2008, 352 pages.

Pour poursuivre la route ensemble...
Don’t Leave Me Now – Samuel Lebon, Ne pleure pas sur moi

Ce court texte d'amour et de béances, fracassé et inattendu, suppure de références explicites pour les amateurs de dingueries du plat pays. Il s’avère bien moins gratuit que son postulat d’ouverture et ses poses cavalières ne le laissent supposer.

Le mauvais présage |Stéphane Audoin-Rouzeau, La Part d’ombre, le risque oublié de la guerre

Ces entretiens, plus encore que scientifiquement indispensables (là n’est pas vraiment leur objectif) nous placent en position d’écoute profonde, qui est toujours la plus bénéfique des positions du lecteur.

« La condition de l’amour, c’est le silence » – Charles de Foucauld, Déserts

Pour A.K. « Il faut lire les extraits de ce Dictionnaire touareg-français [de Charles de Foucauld] comme l’un des hymnes les plus lumineux à la beauté de la création, dans la transparence d’un regard qui n’est plus orienté par le désir mais par l’accueil. (…) L’auteur n’est pas déterminé seulement par > Lire plus

« Power is exerted vertically on people who clash horizontally » ~ Jérôme Sessini, Inner Disorder – Ukraine, 2014-2017

« Je n’ai rien fait qu’être là, ces trois dernières années. Je me suis mis à la place de l’autre, et j’ai refusé de choisir un camp. »

« Oublier les chiens de la peur » – John Cowper Powys, L’art d’oublier le déplaisir

« Pour les plus intelligents d’entre nous, c’est sans doute le devoir d’affronter la vérité déplaisante, et non pas celui de l’éviter, qui a engendré le plus grand nombre de désastre. » John Cowper Powys, écrivain-philosophe gallois, est mort il y a 60 ans, le 17 juin 1963. Soumis sa vie durant > Lire plus

« Les gens du désert sont plus faciles à guérir » – Bruce Chatwin, Le Chant des pistes

« Dans la foi aborigène, une terre qui n’est pas chantée est une terre morte, puisque, si les chants sont oubliés, la terre elle-même meurt. » « La plus grande partie de l’intérieur de l’Australie n’était que broussailles arides ou désert. Les pluies y tombaient toujours de façon très inégale et une année > Lire plus

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