Une nouvelle édition des Pensées pour moi-même de Marc Aurèle vient de paraître. Ou plutôt, la reprise identique de l’édition de 1947, traduite par A.-I. Trannoy et introduite par Aimé Puech, dans une nouvelle mise en page qui ouvre et ferme chacun des 12 livres par une illustration en noir et blanc de Scott Pennor’s. Je m’intéresse à Marc Aurèle depuis longtemps et j’ai profité de cette nouvelle édition pour me replonger, une fois encore, dans ces considérations extrêmement bénéfiques, jamais péremptoires, fermes et inébranlables dans leur fond, mais douces et bienveillantes dans leur formulation. Ce ne sont jamais des assertions autoritaires et hystériques, mais toujours des propositions. Des programmes personnels à tenter d’accomplir jour après jour après jour, malgré les invasions et les désastres. Dans le chaos, nous dit-il, il y aura toujours au moins une heure de repli sous une tente, celle-là même ou lui se réfugiait après d’âpres combats contre les barbares du Danube, pour tenter de demeurer droit tel le « promontoire, sur lequel sans cesse se brisent les vagues : lui reste debout, et autour de lui viennent mourir les bouillonnements du flots. » Employons cette seule heure, s’il n’en demeurait qu’une, à prendre du recul et soigner son âme.
Voici quelques propositions tirées des douze livres, parmi mes favorites, dans cette belle traduction que je suis fière de voir ici exhumée, et enluminée de gravures frappantes, pétries de finesses.
Ceci n’est pas un malheur. Mais le supporter noblement est un bonheur. IV, 49
Rien n’arrive à un homme qu’il ne soit naturellement capable de supporter. V, 18
Une excellente manière de te défendre d’eux, c’est d’éviter de leur ressembler. VI, 6
Fouille en dedans. C’est en dedans qu’est la source du bien et elle peut jaillir sans cesse, si tu fouilles toujours. VII, 59
Les hommes étant faits les uns pour les autres, instruis-les ou supporte-les. VIII, 59
Il ne s’agit pas du tout de discuter sur ce que doit être l’homme de bien, mais de lui ressembler. X, 16
Source : Pensées pour moi-même, de Marc Aurèle. Traduit du grec par A.-I. Trannoy. Introduction de Aimé Puech. Illustrations de Scott Pennor’s. Les Belles Lettres, 2015.