En mémoire de David Dewaele et pour Sonia R.
Oh, sleepy child, life goes running wild
Darlin’ life is everywhere, oh sleepy child
« En présence de la nature, une joie sauvage parcourt cet homme, en dépit des chagrins réel. La nature dit: « il est ma créature, et malgré l’insolence de son affliction il sera heureux avec moi ». »
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« Le problème de rendre au monde sa beauté originelle et éternelle trouve sa solution dans le rachat de l’âme. La ruine ou le vide que nous voyons dans la nature est dans notre oeil. L’axe de la vision ne coïncide pas avec l’axe des choses, si bien qu’elles n’apparaissent pas transparentes mais opaques. La raison pour laquelle le monde manque d’unité et gît brisé et en morceaux, c’est que l’homme est séparé de lui-même. Il ne peut étudier la nature tant qu’il ne satisfait pas à toutes les exigences de l’esprit. L’amour lui est aussi nécessaire que la faculté de percevoir. En fait, aucun des deux ne peut atteindre la perfection sans l’autre. Au plein sens du terme, la pensée est une ferveur et la ferveur est une pensée. La profondeur appelle la profondeur. »
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« Lorsqu’on est en bonne santé, l’air est un cordial d’une incroyable efficacité. Traversant au crépuscule, sous un ciel nuageux, un terrain dénudé parsemé de plaques de neige boueuse sans avoir présente à l’esprit l’idée d’une bonne fortune particulière j’ai joui d’un sentiment d’allégresse parfaite. J’éprouvai une joie qui touchait à l’angoisse. Dans les bois aussi, un homme se débarrasse de ses années comme le serpent de son ancienne peau – et à quelque période de la vie qu’il soit, il est toujours un enfant. Dans les bois se trouve la jeunesse éternelle. Parmi ces plantations de Dieu règnent la grandeur et le sacré, une fête éternelle est apprêtée, et l’invité ne voit pas comment il pourrait s’en lasser en un millier d’années. Dans les bois, nous revenons à la raison et à la foi. Là, je sens que rien ne peut m’arriver dans la vie, ni disgrâce, ni calamité (mes yeux m’étant laissés) que la nature ne puisse réparer. Debout sur le sol nu, la tête baignée par l’air joyeux et soulevée dans l’espace infini, tous nos petits égoïsmes s’évanouissent. »
Extraits de Ralph Waldo Emerson, La Nature, traduit par Patrice Oliete Loscos, Allia, 2004.
Captures du film Hors Satan, de Bruno Dumont, 2011.