« Qui ne s’élève pas devient un raisonneur borné, avec lequel il devient difficile de débattre. »
Alors qu’en Chine ancienne la dynastie Han touche à sa fin (vers 220 après J.C.), un mystérieux maître Meou se détourne de l’administration du pouvoir, chemin habituel des lettrés, pour suivre la « Voie du Bouddha ». Le bouddhisme apparaît en Chine sous l’empereur Ming, probablement par les voies de l’Asie centrale, mais peut-être également par les circulations maritimes. Rares sont les documents parvenus nous permettant d’en attester formellement. Plusieurs bouddhismes se côtoient rapidement, et leur compréhension diffère selon qu’on se situe au Sud ou au Nord du pays. L’itinéraire assez inédit encore de maître Meou lui vaut de vives critiques de plus ou moins bonnes fois, confusions qu’il entreprend de dissiper dans ce traité composé de questions posées par ses détracteurs auxquelles il répond par des arguments précis et des images. « L’un des enjeux du Meou-tseu est de montrer la grande diversité des manières de « préparer la voie » au Bouddha en Chine », nous renseigne la traductrice Béatrice L’Haridon dans une longue, riche et très complète introduction, intellectuellement stimulante. Cette forme vivante qui rappelle nos dialogues platoniciens enchante par les explications fournies, les formules piquantes et les traits lumineux qu’elle recèle. De sorte qu’on en apprend mieux, sans (trop) peiner, sur la jeune réception des préceptes du Bouddha en Chine, et leur rapprochements – et écarts, avec le Tao et Confucius. L’édition, savante et bilingue, permet aux plus aventuriers de pousser loin, mais n’empêche pas les dilettantes de s’y promener avec délice, en rapportant de leur pèlerinage sans bouger de belles poignées d’orge pour l’âme.
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[Sur la place des lettrés près du pouvoir] « Un lettré d’intention pure doit être invité (il ne peut proposer lui-même ses services), un ministre avisé attend d’être reçu. »
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« Lorsque des gens calamiteux sont incapables de pratiquer la Voie bouddhique, la faute en revient-elle à cette Voie ? »
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« Laozi a dit : « Lorsqu’il entend parler de la Voie, le lettré supérieur s’empresse de la pratiquer de toutes ses forces, le lettré moyen parfois y adhère, parfois la néglige, le lettré inférieur éclate de rire. » Je crains cet éclat de rire et pour cette raison je ne cherche pas à en parler. Il est possible d’étancher sa soif à une source, à un puits, sans attendre de trouver les grands fleuves. Ainsi, je continue à étudier les Classiques et leurs commentaires. »
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« Confucius disait : « Ne pas parler à un homme avec qui on peut parler, c’est perdre un homme. Parler à un homme avec qui il est impossible de parler, c’est perdre ses mots. » Comme sagesse et folie ont chacune leur temps, le débat a sa propre portée. Comment pourrait-il s’agir de débattre seulement sans jamais pratiquer ? »
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« Le sage a dit : « Ceux qui mangent des céréales sont perspicaces, ceux qui mangent des herbes sont stupides, ceux qui mangent de la viande sont téméraires, ceux qui mangent du souffle vivent longtemps. » »
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Meou-tseu, Dialogue pour dissiper la confusion, traduit, introduit et commenté par Béatrice L’Haridon, bilingue chinois-français, Les Belles Lettres, Bibliothèque chinoise, 2017.