Pour A.K.
« Il faut lire les extraits de ce Dictionnaire touareg-français [de Charles de Foucauld] comme l’un des hymnes les plus lumineux à la beauté de la création, dans la transparence d’un regard qui n’est plus orienté par le désir mais par l’accueil. (…) L’auteur n’est pas déterminé seulement par le souci de précision qui anime tout lexicographe, par un besoin de fidélité au peuple dont il veut être la conscience et la parole ; il est mû aussi par une soif d’union, qui souvent suscite un élan d’empressement et de partage au-delà même du concept décrit. (…)
Joindre, se joindre aux nuits, aux jours, aux bruits des caravanes, aux chants de l’amour, aux vents du désert, aux couleurs des sables. (…) La vie connue, aimée, par cette fidélité passionnée au détail, par la longue observation qui caresse la chose qu’on contemple ; et la parole se renouvelle, s’épanouit, semble retrouver une fraîcheur oubliée, elle luit comme une rosée d’aubade, comme un « gris alouette » qui chante sur la plage dans notre mémoire. (…)
Il ne faut pas chercher, dans ce Dictionnaire et dans les extraits proposés ici, ni l’exotique de l’explorateur ni le spirituel de l’élu : il suffit simplement de respirer lentement au rythme des nuits et des dunes, des silences et des solitudes peuplées d’appels, d’écoute ; de savourer ces mots goutte à goutte. (…)
Demandons cette aumône – et cette sagesse : « La condition de l’amour, c’est le silence. » »
Carlo Ossola, préface à Déserts, de Charles de Foucault, Rivages poche / Petite Bibliothèque, 2013