Chronique Erreur 404 publiée le 10 décembre 2017 sur Profession-Spectacle

Lundi

La mode du hygge sévit depuis trois ans au moins ; tous les hivers, elle est de sortie en librairie, en cosmétique et en décoration d’intérieur. Il s’agit d’aller bien avec des pyjamas laids, des bougies et du chocolat chaud. Mads Mikkelsen, dans une de ces vidéos éperviers qui fondent sur vous à la vitesse de l’éclair, a l’air de nous dire que cela fonctionne, cela doit être vrai.

Vous entrez dans une librairie le sérieux vrillé au fond des poches, gris comme une fin d’incendie qui implore de repartir, en vous demandant quel scandinave maudit comme Stig Dagerman va bien pouvoir vous faire un signe ami, et vous tombez sur une table entière de livres sur les bougies et les chocolats chauds danois : donnez-moi une meilleure raison de terminer brutalement de se retrancher à tout jamais des hommes ?

Mardi

« Il faut bien vivre », la sentence empoisonnée. Imaginez William Wallace, dans sa campagne écossaise, en train de regarder passer les Anglais en soupirant cette phrase, puis en retournant couper du bois pour chauffer le château de ses nouveaux maîtres. Dès que tu prononces « il faut bien vivre », tu sais au plus profond de toi que tu l’as ratée, cette vie.

Mercredi

« Le but des sciences sociales n’est pas de constituer l’homme, mais de le dissoudre » (Claude Lévi-Strauss).

Au social, préoccupé par sa passion dévorante pour le chiffre à égaliser, il faut toujours reprendre l’humain qu’il tient en otage.

Jeudi

La saison incite à penser à son épitaphe. J’essaye celle-ci : « Vous n’êtes pas plus vivants que je ne suis morte mais vous, vous pouvez encore y remédier. »

Vendredi

La sagesse est un jeu de cryptage. Il s’agit d’employer son existence à percevoir exactement tout ce qui n’a pas été clairement formulé, et de ne pas tenter de lui en faire de la publicité.

Pour poursuivre la route ensemble...
Tout se passe toujours sous terre, Dan

Je ne suis pas fière d’écrire ceci. J’aurais voulu des bâtisses solides, je vois des boules de paille s’envoler derrière les vitres sales sur les villes fantômes de pays que je n’ai jamais vus. Parce que je ne veux pas les voir. Parce que l’ensemble détonne. N’est plus possible. Ravale.

Goût de terre

… et j’ai regardé le ciel sans étoile, je n’en ai pas cherché non plus, j’avais les âmes trop occupées. Je réfléchissais à la grande et la petite méchanceté. J’essuyais la moiteur sur ma poitrine dans le lit éventré. J’écoutais la parole angoissée, je regardais les rides se figer. J’avais > Lire plus

Le centre de contrôle des données et la couleur d’origine | Carnets actifs

J'ai lu un livre, d’ailleurs, pas mauvais, pas abouti non plus, mais l'un de ceux qui ouvrent encore les vannes et tant pis pour ta gueule, sorte d'expédition punitive de son lectorat, ce qui, convenons-en, devient de plus en plus rare.

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La haine, abri antiatomique durable

À propos de La Haine, de Günther Anders | C’en est même devenu tristement pathétique, ces concours de vertu qui demandent à chaque être bien portant de ne pas détester, ou de courir se faire soigner si le symptôme persistait après de multiples rappels à l’ordre passifs-agressifs, chantages affectifs ou > Lire plus

Une balade française

« Je commence à en avoir assez de vivre des heures historiques. » Maurice Garçon, Journal, 1944. « Chacun de nos gestes compte. » Slobodan Despot, Le Miel, 2014. Je regarde passer des oiseaux en groupe, au-dessus d’un vaste champ arrêté, à côté d’un arbre. Je ne suis pas arrivée depuis assez longtemps de > Lire plus

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Rues barbares et loup solitaire

À propos de Rues barbares. Survivre en ville, de Vol West et Piero san Giorgio | « Je salue le courage des forces de l’ordre » serait d’ailleurs, à n’en point douter, la phrase furieusement tendance en ouverture de toutes les soirées de fin d’année parisiennes.