« C’est la gloire des Romantiques, juste devant la précipitation des temps modernes qu’aucune main humaine bientôt n’allait pouvoir retenir, d’avoir écouté ce sang-là en eux-mêmes, d’avoir voulu pour notre temps, à la façon universelle des poètes, joindre encore et réappartenir plus sensiblement que jamais à cette humanité profonde, toujours la même au fond des âges. D’avoir eu faim et soif de toute grandeur.

Où sont donc nos poètes, qui sont-ils, à travers lesquels on regardera plus tard la couleur de ce temps-ci ? Qu’avons-nous fait nous-mêmes de notre siècle écrasant et quel nom porte-t-il ? Qui sommes-nous misérables ! avec nos machines, nos guerres insensées et les mâchoires du Progrès refermées sur nous – qui sommes-nous au milieu des âges de l’Homme ? L’esprit d’enfance est-il à jamais mort entre nos mains ?

Ou reste-t-il encore parmi nous des hommes, affreusement solitaires, qui se soient faits en solitude capables pour nous tous, d’entendre encore et toujours, depuis ici, et maintenant, la haute voix des frères humains, la millénaire, l’unique voix humaine qui se tient derrière les paroles et qui retentit, mystérieusement, chaque fois que l’homme touche à lui-même ? Tantôt ouverte sur la nuit pesante et se répercutant au fond des abîmes, et tantôt déchirée de surnaturelles lueurs, cette authentique voix de l’homme, qui réapparaît brusquement aux heures capitales, transperce et disperse ses langages. »

Armel Guerne, Hic et nunc, in L’Âme insurgée, Phébus (1977), Points 2011, page 54.

Pour poursuivre la route ensemble...
La part non négociable | D. Foy, Absolutely Golden

"Jack vivait son danger. Il courait avec les bêtes de ce monde, les chiens les plus fous et les chevaux les plus sauvages, croyant, d'une certaine manière, que c'était bon pour lui alors qu'elles le tuaient à petit feu, comme on dit, ces bêtes qui étaient ses amies."

Paris, par la petite porte – Sergio Aquindo, Bête à gravats

Un premier roman en récit généreux, au cœur du monde des travailleurs pauvres, immigrés ou non, qui garde dans son humanité imbibant chaque page le souvenir vif de cette entrée en la matière brute et sans pitié.

Le noir positif et la belle vie difficile | Karen Blixen

« Les grands calaos sont des oiseaux très étranges. Les voir est une expérience en soi, pas entièrement plaisante du reste, car ils ont l’air si omniscients. Un matin, avant le lever du soleil, j’ai été réveillée par un caquetage aigu devant la maison et, en sortant sur la terrasse, j’ai > Lire plus

En terrain glissant – Glose, de Juan José Saer

« Un sentiment nouveau se mêlait à son humiliation et à sa rage : le désespoir que nous éprouvons quand nous constatons que, pour intense que soit notre désir, les desseins du monde extérieur n'en tiennent aucun compte. » Glose (Glosa, 1986, traduit par la traductrice de renom Laure Bataillon en 1988 > Lire plus

Simone Weil, La Personne et le Sacré – Le cri est infaillible

« Il est inutile d’expliquer à une collectivité que dans chacune des unités qui la composent il y a quelque chose qu’elle ne doit pas violer. D’abord une collectivité n’est pas quelqu’un, sinon par fiction ; elle n’a pas d’existence, sinon abstraite ; lui parler est une opération fictive. Puis, si elle était > Lire plus

Quand le monde fut vide | Jack London

"- Ce jour où nous étions aurait dû être un jour splendide d'été. Mais les tourbillons de fumée de ce monde en feu continuaient à voiler le ciel d'un épais rideau, où le soleil sinistre n'était plus qu'un disque mort et rouge, sanguinolent. De ce soleil de sang nous avions > Lire plus

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