« (Les femmes) Ne sont-elles pas étranges ? Elles vous appellent au secours et l’instant d’après elles vous repoussent. Ou bien c’est le contraire: elles vous repoussent et l’instant d’après elles se précipitent convulsivement vers vous. Elles sont comme les chauves-souris, elles émettent en permanence des ultrasons qui leur reviennent plus ou moins modifiés par le paysage extérieur.  En frappant constamment tout ce qui les environne avec des sons qu’elles sont les seules à pouvoir « lire », elles nous utilisent comme si nous n’étions que de la matière à réflexion. Soit des creux, soit des bosses faits pour leur renvoyer l’écho de leur ultra-sensibilité féminine. Sans ça, nous ne connaîtrions plus de paix. Si nous étions en mesure de percevoir réellement les flèches de l’ultra-sensibilité féminine qui sans relâche nous frappent de tous les côtés à la fois, je crois que nous ne survivrions pas à une telle somme de confusions croisées. Seuls les appels au secours lancés par nos femmes nous parviennent. Hormis les appels au secours nous n’entendons rien. Des bruits fantômes, perdus pour nous, nous dessinent en creux, nous frappent et s’en retournent vers celles qui les émettent. Bruit infernal pour elles, que ce bruit inaudible pour nous. Il occupe l’espace, l’espace autour de nous en est entrecroisé comme une forêt. Et nous n’entendons rien ! Voyez toutes ces femmes couchées sur les tables et sur les bancs dans ces poses d’une indécence insoutenable. Si vous pensez que chacune de ces femmes en voyage ne cesse d’émettre des cris muets pour nous autres hommes, des cris de détresse, j’en suis sûr, qui continuellement rebondissent et toujours leur reviennent, avouons qu’on se trouve accablé à l’idée de l’immense souffrance que représente cette lecture ininterrompue pour des nerfs fragiles comme le sont les nerfs de nos femmes. »

Serge Rezvani, La Traversée des Monts Noirs, Belles Lettres, 2011, pages 99-100.

Pour poursuivre la route ensemble...
L’aposémantisme de la grenouille des fraises et du kokoï

"Le but du camouflage semble évident, tant pour les prédateurs que pour les proies. Pourtant, de nombreuses espèces animales arborent des couleurs vives et chatoyantes attirant l'oeil. Comme ce sont souvent des animaux qui pourraient être des proies faciles, tels les amphibiens, les reptiles, les papillons ou autres insectes, on > Lire plus

Déclin et salut de la littérature : Philitt revient, et redresse

« Laissons aux idéologues du déclinisme l’illusion d’un âge d’or révolu de la littérature – et osons être présents à notre monde. »

Ma musique sous ta botte | Julien Delmaire, Delta Blues

Delta Blues, commencé le cou sous la botte à rechercher son air se termine dans un tonnerre de cordes saturées, de bouffées humides de restes d’inondation et de tas de cendres des feux de croix de petites bites en cagoules de draps.

Ser terco. Insistir – Marion Messina, Faux Départ

Sobre, digne et cru, le style de Marion Messina, qui suit son héroïne simple et franche, ne cède jamais ni au sarcasme ni au pathos. Résolue à se battre, résignée à simplement survivre, Aurélie donne une voix à la jeunesse provinciale motivée mais perdante d'avance. La jeune prodige égratigne avec > Lire plus

Junichirô Tanizaki, Éloge de l’ombre – La fallacieuse beauté de la pénombre

Tout bien pesé, c’est parce que nous autres, Orientaux, nous cherchons à nous accommoder des limites qui nous sont imposées que nous nous sommes de tout temps contentés de notre condition présente ; nous n’éprouvons par conséquent nulle répulsion à l’égard de ce qui est obscur, nous nous y résignons comme > Lire plus

De part et d’autre du continent tragique – Llewelyn Powys, De l’ébène à l’ivoire

Sur l’ébène et l’ivoire est gravé le même sombre destin. Proverbe arabe « Ecoute, quand tu as le temps, tu devrais noter tous les jours des impressions vivaces de ton pays pour en faire – à la Conrad – quelques nouvelles. Garde la main en notant dans ton journal toutes les > Lire plus