« (Les femmes) Ne sont-elles pas étranges ? Elles vous appellent au secours et l’instant d’après elles vous repoussent. Ou bien c’est le contraire: elles vous repoussent et l’instant d’après elles se précipitent convulsivement vers vous. Elles sont comme les chauves-souris, elles émettent en permanence des ultrasons qui leur reviennent plus ou moins modifiés par le paysage extérieur.  En frappant constamment tout ce qui les environne avec des sons qu’elles sont les seules à pouvoir « lire », elles nous utilisent comme si nous n’étions que de la matière à réflexion. Soit des creux, soit des bosses faits pour leur renvoyer l’écho de leur ultra-sensibilité féminine. Sans ça, nous ne connaîtrions plus de paix. Si nous étions en mesure de percevoir réellement les flèches de l’ultra-sensibilité féminine qui sans relâche nous frappent de tous les côtés à la fois, je crois que nous ne survivrions pas à une telle somme de confusions croisées. Seuls les appels au secours lancés par nos femmes nous parviennent. Hormis les appels au secours nous n’entendons rien. Des bruits fantômes, perdus pour nous, nous dessinent en creux, nous frappent et s’en retournent vers celles qui les émettent. Bruit infernal pour elles, que ce bruit inaudible pour nous. Il occupe l’espace, l’espace autour de nous en est entrecroisé comme une forêt. Et nous n’entendons rien ! Voyez toutes ces femmes couchées sur les tables et sur les bancs dans ces poses d’une indécence insoutenable. Si vous pensez que chacune de ces femmes en voyage ne cesse d’émettre des cris muets pour nous autres hommes, des cris de détresse, j’en suis sûr, qui continuellement rebondissent et toujours leur reviennent, avouons qu’on se trouve accablé à l’idée de l’immense souffrance que représente cette lecture ininterrompue pour des nerfs fragiles comme le sont les nerfs de nos femmes. »

Serge Rezvani, La Traversée des Monts Noirs, Belles Lettres, 2011, pages 99-100.

Pour poursuivre la route ensemble...
Les êtres responsables – Ernesto Sabato, Censure, liberté et droit à la divergence

« Je n’appartiens pas à ce genre de démagogues et d’hypocrites qui se déclarent opposés à toute forme de censure par principe », annonce-t-il d’entrée de jeu. « Le problème n’est pas là, poursuit-il plus loin. Le problème survient quand c’est l’Etat qui fait cela dans la vie publique au moyen de procédés > Lire plus

Armel Guerne et les Romantiques

"C'est la gloire des Romantiques, juste devant la précipitation des temps modernes qu'aucune main humaine bientôt n'allait pouvoir retenir, d'avoir écouté ce sang-là en eux-mêmes, d'avoir voulu pour notre temps, à la façon universelle des poètes, joindre encore et réappartenir plus sensiblement que jamais à cette humanité profonde, toujours la > Lire plus

Mouvements d’ailes – Kenneth White, La Figure du dehors

I don't want to talk about the wings, I just want to fly. The Waterboys Roi de beauté haut la main dans les contrées qui abolissent les concours, il lui arrive de décrire ses ailes, mais le plus souvent, il se contentera de voler. Plutôt que de confortablement prendre position > Lire plus

Brice Erbland : De la hauteur

Crédit photo Qui n’appréhende rien présume trop de soi. Pierre Corneille, Polyeucte. À la mémoire des hommes tombés pour tous. J’ai terminé de lire Dans les griffes du Tigre, récits d’un officier pilote d’hélicoptère de combat, de Brice Erbland, la veille de l’annonce de l’entrée en guerre de la France aux côtés du > Lire plus

Nelly Sachs, Lament

Aux Marie, de Belgique, de Corse et d'ailleurs Je prends la parole sacrée de la poétesse allemande Nelly Sachs, liée en des bribes ardentes vers un unique livre que toutes ses dernières forces promettent. Je les sépare pour apaiser ma peur, mais toujours l’ensemble survit. Étouffée, rendue muette par les > Lire plus

Ils aiment la vie, la vie profuse, en attente, offerte à qui sait

« Mais ils [les auteurs islandais] ont en plus, comme systématiquement, un don de poésie, un sens de l’ailleurs et de l’autrement, une conscience des forces occultes qui nous mènent à notre insu, qui transfigurent, littéralement, leur façon de dire. Ils savent l’aliénation de l’homme d’aujourd’hui, le manque de chaleur, la > Lire plus