« C’est la première fois de ma vie que je prends part à une enquête comme la vôtre, et il a fallu tout votre savoir-faire professionnel et toute votre bonne grâce pour que je réponde à celle-ci. J’ai une prévention contre les enquêtes. On en a beaucoup abusé dans mon pays au cours des années qui précédèrent le désastre, et je crois que, chez nous comme ailleurs, cette mode nord-américaine a beaucoup contribué à donner au public l’illusion que les malheurs qui accablent le monde pourraient être réduits à un certain nombre de problèmes susceptibles d’être résolus par des spécialistes et des experts — ce qu’on est convenu d’appeler les « compétences ». Je ne suis plus assez jeune, malheureusement, pour me moquer des compétences comme nous l’avons tous fait à vingt ans, mais je crois toujours que la vie n’est pas un problème à résoudre, c’est un risque à courir — le risque des risques — et, en face de ce risque total, les seules compétences que je reconnaisse sont le génie et la sainteté. »

Extrait de Réponse à une enquête, janvier 1942

« Nous rencontrons ainsi tous les jours des gens que nous nous efforçons de guérir de leurs illusions, alors qu’ils les ont perdues depuis longtemps ; ils n’ont seulement pas le courage de s’en créer d’autres, et la simple vérité leur fait peur. C’est ce qui rend tant de conversations suspectes, et décevante la profession de convertisseur. On voit ainsi beaucoup de malheureux passer d’une opinion à une autre, et nous nous apercevons vite qu’ils n’ont fait que changer de fauteuil : la seule chose qu’ils ne savent pas faire, c’est de se tenir debout. »

Extrait de Réflexions sur le cas de conscience français, octobre 1943

Georges Bernanos, La Révolte de l’esprit, Ecrits de combats 1938-1945, présentation de Gilles Bernanos, Les Belles Lettres, 2017, 416 pages.

Pour poursuivre la route ensemble...
« Mais heureusement, nous ne sommes pas une race sympathique » – Aldous Huxley, Jaune de Crome

« En cet instant même, poursuivit-il, il se passe les horreurs les plus épouvantables dans tous les coins du monde. Il y a des gens qui se font écraser, taillader, désentripailler, mutiler; leurs cadavres pourrissent et leurs yeux se décomposent avec le reste. Des hurlements de douleur et de peur vibrent > Lire plus

Xénophon, Mémorables – Se gouverner soi-même avant de prétendre gouverner les autres

À mon avis, par Héra, un homme libre doit souhaiter de ne pas tomber sur un tel esclave ; inversement, celui qui est esclave de ce genre de plaisirs doit supplier les dieux de tomber sur de bons maîtres, car c’est seulement ainsi qu’il pourra être sauvé.

Ernst Jünger – « Nous étions trop les uns sur les autres»

Et l’homme est bon. Sinon, comment pourrait-on vivre à ce point les uns sur les autres ? Chacun le dit en parlant de lui-même. Personne n’a été l’agresseur. Tout le monde a été l’agressé.

Sept auteurs capitaux contre le royaume des imbéciles, 1

Cette urne contiendra ce que l’univers n’a pu contenir. Septime Sévère devant sa future urne funéraire. Ce n’est pas le hasard, mais la finalité qui règne dans les œuvres de la Nature, et à un haut degré ; or, la finalité qui régit la constitution ou la production d’un être est > Lire plus

Retourner dans la chambre – Lokenath Bhattacharya, Où vont les fleuves

Mais consciemment ou non, l’expérience à laquelle aspire l’écrivain, qu’il parviendra peut-être à goûter si les circonstances sont favorables, est, au sens le plus large, de nature profondément religieuse.

Paul Gadenne, L’Enfer de Sartre – La souffrance morne de l’athée révolté

À vrai dire une seule chose intervient ici pour démentir quelque peu cette impression : la violence avec laquelle ces êtres s’en prennent à leur destin. Il y aurait beaucoup à dire là-dessus, car à vrai dire la révolte ne se justifie que si l’on peut en appeler à quelqu’un. > Lire plus